Archéologie de l'architecture, de l'enfance, de l'histoire, du corps, des temps
Les enfants de Saint Gildas des Bois - vitraux
Thématiques - Cristal - Photographie
Être l'enfant d'un personnage célèbre n'est certainement pas une position facile.
Il faut se faire, sinon un nom, du moins un prénom. Cela exige une force de caractère singulière,
mais la présence du père et/ou de la mère rend possible un conflit émancipateur.
Mais qu'en est-il des enfants dont le père et parfois la mère ont disparu dans des circonstances
particulièrement violentes et tragiques ?
A première vue, on pourrait s'imaginer qu'être l'héritier d'un héros fusillé durant la Résistance,
qu'il s'appelle Gabriel Péri, Georges Politzer, Charles Michels, Pierre Semard, Lucien Dupont,
Robert Peltier ou Jacques Decour donne une légitimité morale et sociale indiscutable.
Mais ce serait être très loin de la réalité de la solitude qui va être la leur. Ces enfants de l'amour
sont aussi des enfants de la mort et ils portent dans leurs bras ces deux fardeaux sans savoir
où les déposer.
Christiane Lauthelier est née le 16 avril 1943 au Val de Grâce à Paris (alors hôpital militaire
allemand) où sa mère Marcelle Bastien est en détention. En effet, cette dernière, engagée
dans la Résistance comme agent de liaison de Lucien Dupont, a été arrêtée le 8 juillet 1942
à Bordeaux, mise au secret et torturée au Fort du Hâ par la police de Vichy puis livrée aux
Allemands.
Son père, Lucien Dupont, militant aux Jeunesses communistes, est arrêté une première fois,
en septembre 1939. Dès sa sortie de prison, il met sur pied l’Organisation spéciale du Parti
communiste et réalise plusieurs attentats contre les troupes d'occupation allemande.
Il est à nouveau arrêté le 16 octobre 1942 et fusillé au Mont Valérien le 26 février 1943.
Marcelle Bastien, quant à elle, envoyée au camp de Romainville avec sa fille,
est déportée en août 1943 à Ravensbrück. Christiane est alors recueillie par la Croix rouge et
envoyée chez les parents de Lucien Dupont qui l’élèvent jusqu’au retour de sa mère.
Pierrette Legendre est née le 2 juin 1935 de Yvette Semard et Émile Judith. Sa mère s'est
séparée de son mari en 1937 et a rencontré André Berthelot, ouvrier électricien, militant
communiste.
Pierrette Legendre a finalement été élevée par ses grands-parents, Pierre et Juliette Semard.
Pierre Semard, secrétaire général de la Fédération des cheminots et secrétaire général du
Parti communiste français est une figure centrale de l'Internationale communiste
et du syndicalisme.
En 1936, lors de la création de la SNCF, il est un des quatre administrateurs
issus de la représentation syndicale. Il est révoqué en 1938 pour avoir signé des tracts appelant
à la grève. En octobre 1939, il est arrêté pour infraction au décret ordonnant la dissolution
du Parti communiste et fusillé le 7 mars 1942. Son épouse Juliette est pour la même
raison condamnée aux travaux forcés et déportée à Ravensbruck.
La mère de Pierrette Legendre, Yvette Semard, est arrêtée le 6 février 1942, Son père adoptif,
André Berthelot est arrêté le 16 octobre 1942 et fusillé le 26 février 1943.
Denise Bailly-Michels est née le 1er mai 1930 de Aimée Malagnoux et Charles Michels.
Durant leur enfance, Denise et sa sœur aînée Régine ont été confrontées aux difficultés de
la vie ouvrière. Leur père, aîné d'une famille de quatre enfants, était entré à l’âge de treize ans
comme apprenti cordonnier dans une fabrique de chaussures de la région parisienne.
Son activité syndicale lui valut d'être licencié à plusieurs reprises. Élu secrétaire permanent
du syndicat CGTU, puis député communiste en mai 1936, il participe à la mise en place
des congés payés et des 40 heures.
Déchu de son mandat législatif en janvier 1940 pour
appartenance au Parti communiste, il est interné au mois de mai 1941 au camp de Choisel
à Châteaubriant. Suite à l'exécution d'un officier allemand par la Résistance, le général
Stülpnagel ordonne de fusiller cinquante otages. Pierre Pucheu, ministre de l’Intérieur
de Pétain, choisit vingt-sept internés de Châteaubriant, tous liés à la CGT et au Parti
communiste. Charles Michels est le numéro un de la liste et fusillé le 22 octobre 1941.
Brigitte Decourdemanche est née en août 1933 de Daniel Decourdemanche et
Jacqueline Bailly. Son père, agrégé d’allemand et écrivain, a pris le nom de plume
de Jacques Decour, nom qu'il conservera dans la clandestinité.
Militant aux Jeunesses communistes, rédacteur en chef de la revue Commune, il poursuit
avant-guerre sa thèse sur la religiosité romantique en Allemagne.
Dès octobre 1940, il se voue à l’organisation de la Résistance intellectuelle et il fonde
avec Jacques Solomon et Georges Politzer les revues clandestines l'Université libre
et la Pensée libre. En octobre 1941, il crée avec Jean Paulhan les Lettres Françaises
clandestines.
Arrêté le 17 février 1942, il est fusillé au Mont Valérien le 30 mai 1942.
Pauline Talens-Péri est née en octobre 1937 de Vicente Talens Inglas et de Pauline Taurinya.
Très tôt confrontée aux difficultés de la vie ouvrière, sa famille maternelle s'est rapprochée de
la mouvance communiste. En 1922, sa mère épouse André Marty, futur responsable de
l'Internationale communiste. En 1927, c'est Gabriel Péri, journaliste renommé et futur député
communiste, qui rejoint la famille Taurinya en épousant la soeur cadette, Mathilde.
Durant la guerre d'Espagne, Pauline Taurinya, séparée d'André Marty, rencontre Vicente Talens
Inglas, gouverneur républicain de la province d'Almeria, avec lequel elle a une fille nommée
elle aussi Pauline.
Le 30 mars 1939, Pauline et sa mère fuient l'Espagne pour la France. En mars 1940, elles sont
internées au camp de femmes de Rieucros. Son père ayant été fusillé par les franquistes
à Valence le 25 juin 1940, Pauline est adoptée par son oncle Gabriel Péri.
Arrêté le 18 mai 1941, Gabriel Péri est interné à la prison de la Santé et fusillé au Mont Valérien
le 15 décembre 1941.
Pauline Talens-Péri est alors élevée par sa tante Mathilde, dont le statut de député permet de
protéger la jeune fille privée de papiers d’identité officiels.
Aurélia Mouedeb est née le 3 mars 1942 à Paris à l'hôpital Baudelocque dit hôpital
des Enfants abandonnés..
En août 1937, sa mère Aurélie Zahner épouse René Dellepiane qui, en 1940, est fait
prisonnier de guerre en Allemagne. Aurélie Zahner rencontre alors Robert Peltier,
ouvrier modeleur sur métaux, jeune militant communiste engagé dans les premiers
groupes armés des Bataillons de la Jeunesse du colonel Fabien. Spécialisé dans les
déraillements de trains à destination de l'Allemagne, Robert Peltier est arrêté le
1er novembre 1941 et fusillé au Mont Valérien le 9 mars 1942, six jours après la naissance
de sa fille Aurélia qu'il n'a donc pu reconnaître comme son enfant légitime.
Au registre d’état-civil, seuls ses prénoms apparaissent : Aurélie Jeanne Roberte.
Elle est confiée à une nourrice à Enghien-les-Bains jusqu’en 1946.
Michel Politzer est né le 24 août 1933 à Biarritz. Son père, Georges Politzer, né en 1903
dans une famille juive hongroise, participe en 1919 à la révolution de Béla Kun.
Il quitte ensuite la Hongrie pour Paris où il devient agrégé de philosophie. Fondateur de la revue
Philosophies et de la Revue de psychologie concrète, il y développe son intérêt pour
la psychologie et la psychanalyse. Lors d'un voyage à Biarritz, il rencontre Maie Larcade,
fille d’un grand cuisinier basque. Au contact de Georges Politzer, Maie Larcade adhère au
Parti communiste. En 1935, Georges et Maie Politzer se lient à Jacques Solomon et son
épouse Hélène Langevin (fille du physicien Paul Langevin). Militants, professeurs à
l'Université ouvrière, journalistes, Georges Politzer et Jacques Solomon sont bientôt rejoints
par Jacques Decour. Dès septembre 1940, ils organisent tous trois la résistance universitaire.
Après l'arrestation de Paul Langevin, ils fondent la revue l'Université libre et la Pensée libre.
Georges et Maie Politzer sont arrêtés le 15 février 1942 par la Brigade Spéciale.Georges Politzer
est fusillé au Mont Valérien le 23 mai 1942. Maie Politzer est internée à Romainville puis
déportée à Auschwitz où elle meurt le 6 mars 1943 du typhus.
Michel Politzer a été élevé par ses grands-parents maternels.
Merci à Michel Politzer
Réalisation - Pascal Convert
Exploitation video - Mélody Lamoix, Jérémie Yazarbal
Son mixage - Saoussen Tatah
Montage - Rémi Rapaie, Camille Gachen
Musique - René Aubry, Rachmaninov
Archives - INA, Pathé, Gaumont, Famille Politzer, Famille Decour, Pascal Convert
Remerciement - ESA Rocailles, Lycée René Cassin, Ville de Biarritz, Grande Plage
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