Archéologie de l'architecture, de l'enfance, de l'histoire, du corps, des temps
Commence alors la grande lumière du Sud-Ouest
Quantum Led in Glass, sérigraphie, 2015
Oeuvre réalisée par Bordeaux Métropole dans le cadre de la commande publique du ministère de Culture et de la Communication.
Avec le soutien financier du ministère de la Culture et de la Communication. Direction Générale de la Création artistique / Direction Régionale des Affaires Culturelles d'Aquitaine.
Photo PC. DR
Lors de ma première visite sur le pont de Birambits à Bègles, j'ai été frappé par la présence envahissante de cette lumière qui flotte au-dessus des voies ferrées.
Elle est là, suspendue entre les clochers des églises bordelaises, l'horizon des voies ferrées et la cité du Dorat. Je me suis alors souvenu de cette phrase de Roland Barthes en forme d’annonce :
Commence alors la grande lumière du Sud-Ouest. Il y a plus de vingt-cinq ans, j’avais réalisé une œuvre dans mon appartement à Bordeaux qui faisait écho à cet écrivain,
œuvre dont le matériau était déjà le verre et le seul motif la lumière. Mais n'était-ce pas trahir cette ancienne banlieue ouvrière, dont je connaissais bien l'histoire
pour avoir longtemps travaillé sur ses militants et résistants, que de lui proposer un texte littéraire apparemment sans lien avec son patrimoine ? J’ai alors pensé aux petits fascicules publiés
par les éditions de Minuit durant la guerre, au rôle de la littérature pour soutenir l'espoir quand il n'y en avait presque plus, aux messages radio clandestins, souvent extraits de poèmes.
Guillaume Apollinaire, Paul Éluard, René Char et bien d'autres ont alors éclairé la nuit. Cette phrase simple, immédiatement compréhensible, s’est ainsi imposée comme le souvenir
d'une "lumière lumineuse" qui éclaire le ciel aquitain : une promesse d'azur.
Pascal Convert
Pascal Convert est né en 1957 d'un père peintre et d'une mère écrivain.
Il a récemment publié aux éditions Grasset un récit biographique titré La constellation du Lion dans lequel il revient sur ses années d'enfance.
Plasticien, auteur de films documentaires et écrivain, la question de la mémoire et de l’oubli est au cœur de son œuvre. Il interroge l’intime, la politique et l’esthétique en utilisant des matériaux comme le verre ou la cire qui rappellent le passage du temps, de la lumière, et la rémanence du passé.
Après avoir suivi des études littéraires, Pascal Convert a montré son travail d'artiste plasticien à la galerie Jean-François Dumont à Bordeaux, en 1987 et en 1989.
La même année 1989, Jean-Louis Froment, alors directeur du capcMusée d’art contemporain de Bordeaux, montre et acquiert pour le compte du Frac Aquitaine
une première œuvre devenue emblématique du travail de l'artiste. La lumière du Sud Ouest joue déjà un rôle majeur dans cette œuvre titrée
"L'appartement de l'artiste", œuvre que le public pourra redécouvrir prochainement lors de l'exposition consacrée à Roland Barthes par le Frac Aquitaine.
En 1989 et 1990, Pascal Convert est pensionnaire en tant que sculpteur à la Villa Médicis à Rome.
En 1992, Jean-Louis Froment organise au capcMusée de Bordeaux une exposition monographique de cet artiste de 35 ans.
A cette occasion, l'historien de l'art Georges Didi-Huberman consacre un livre titré La demeure, la souche à la singularité de sa démarche.
L'amitié qui est née alors entre Pascal Convert et Georges Didi-Huberman aura des implications certaines sur leurs oeuvres mutuelles.
Dans les années qui suivent, ce jeune artiste qui a marqué la scène bordelaise expose à la galerie Nationale du Jeu de Paume, à la Villa Arson, à Moscou, New Delhi, New York...
A la fin des années 90, son travail se rapproche davantage de l'actualité du monde.
Il s'inspire de trois icônes de presse, la Pietà du Kosovo, photographie prise pendant le conflit au Kosovo, la Madone de Benthala,
photographie prise pendant les années noires en Algérie, et la Mort de Mohamed Al Dura à Gaza, séquence video qui a marqué le départ de la seconde Intifada.
De ces icônes, naissent trois sculptures monumentales en bas relief, en cire. Montrées au Musée d’Art Moderne Grand-Duc Jean au Luxembourg, à l’ONU, à Montréal, en Suisse, en Italie, ces sculptures ont marqué la scène artistique des années 2000.
A ce travail sur l'actualité des conflits qui ouvrent le nouveau siècle s'ajoute une recherche sur l'histoire de la Résistance en France.
Petit-fils du Lion des Landes, célèbre résistant aquitain, Pascal Convert est choisi en 2002 pour réaliser le Monument à la Mémoire des Otages
et Résistants fusillés au Mont Valérien entre 1941 et 1944, projet initié par Robert Badinter. On trouve un écho de ce monument en forme de cloche dans la cloche
qu'il avait réalisée en 1999 dans le cadre du 1% artistique du tribunal de grande instance, à Bordeaux.
Soucieux de transmettre aux jeunes générations l'importance de l'histoire, il complète le travail de sculpture
par un film documentaire Mont Valérien, aux noms des fusillés. Cette articulation de la création plastique et de la transmission pédagogique de l'histoire
s'est poursuivie dans les années qui ont suivi.
En 2007, il publie une biographie historique sur Joseph Epstein, juif polonais responsable des Francs-tireurs et partisans (FTP) d’Île de France,
fusillé au Mont Valérien en 1944. Dans le cadre de cette recherche, il produit une sculpture monumentale en cristal titrée Le temps scellé,
acquise par le Musée National d'art moderne et réalise pour Arte un documentaire titré Joseph Epstein, bon pour la légende.
En 2011, après quatre années d'entretiens avec Raymond Aubrac, il publie au Seuil une biographie titrée Raymond Aubrac, Résister, Reconstruire, Transmettre
et réalise avec Fabien Béziat deux films documentaires diffusés sur France 2 consacrés à la vie du célèbre résistant. Lors d'une exposition à la galerie Eric Dupont à Paris,
quelques jours avant le décès de celui qui était devenu son ami, il expose une sculpture en cristal titrée Fragment de conversation avec Raymond Aubrac.
Durant toutes ces années, son travail a été particulièrement présent en Aquitaine. En 1999, il a donc conçu la Cloche du Tribunal de grande instance de Bordeaux,
cloche sur laquelle figure un poème d'Hélène Ilkar évoquant symboliquement un "jour vert flottant", en 2003 les contours des mains
de sa fille enfant lui inspirent le motif des portes en acier corten du Jardin botanique de Bordeaux, en 2008 il illumine d'or la façade en verre
de l’Institut des Sciences de la Vigne et du Vin à Villenave d’Ornon.
Et aujourd'hui, dans le cadre de la commande publique de la ligne C du tramway, c'est à Bègles, sur le pont de Birambits, que son regard s'est arrêté:
"Lors de ma première visite sur le pont de Birambits à Bègles, j'ai été frappé par la présence envahissante de cette lumière qui flotte au-dessus des voies ferrées.
Elle est là, suspendue entre les clochers des églises bordelaises, l'horizon des voies ferrées et la cité du Dorat.
Je me suis alors souvenu de cette phrase de Roland Barthes en forme d’annonce : Commence alors la grande lumière du Sud-Ouest.
Il y a plus de 25 ans, j’avais déjà réalisé une œuvre dans mon appartement à Bordeaux qui faisait écho à cet écrivain, œuvre dont le matériau était déjà le verre
et le seul motif la lumière. Mais n'était-ce pas trahir cette ancienne banlieue ouvrière dont je connaissais bien l'histoire pour avoir longtemps travaillé
sur ses militants et résistants que de lui proposer un texte littéraire apparemment sans lien avec son patrimoine?
J’ai alors pensé aux petits fascicules publiés par les éditions de Minuit durant la guerre, du rôle de la littérature pour soutenir l'espoir
quand il n'y en avait presque plus, des messages radio clandestins, souvent extraits de poèmes. Guillaume Apollinaire,
Paul Éluard, René Char et bien d'autres ont alors éclairé la nuit. Cette phrase simple, immédiatement compréhensible,
s’est ainsi imposée comme le souvenir d'une "lumière lumineuse" qui éclaire le ciel aquitain comme une promesse d'azur."
Mont Valérien, au nom des fusillés, 2003, Arte et Histoire.
Joseph Epstein, bon pour la légende, Lettre au fils, Éditions Séguier 2007, et Arte France 2009.
Raymond Aubrac. Résister, reconstruire, transmettre, Paris, Éditions du Seuil, 2011.
Raymond Aubrac, les années de guerre, France télévision, 2010.
Raymond Aubrac, la décolonisation, France télévision, 2012.
La Constellation du Lion, Paris, Éditions Grasset, 2013.
Appartement de l’artiste, Bordeaux, France, Éditions William Blake & Co, 1988. La Demeure, la souche, Apparentement de l'artiste (Pascal Convert), Georges Didi-Huberman, Éditions de Minuit, 1999. Lamento, Pascal Convert [1998-2005], Textes de Philippe Dagen, Georges Didi-Huberman, Catherine Millet, Bernard Stiegler, Éditions Mudam Luxembourg, 2007 Sur le fil, Georges Didi-Huberman, Éditions de Minuit, 2013.
Galerie Eric Dupont, Paris en 2009, 2011, 2014
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